Le conjoint de français ou d’une personne étrangère titulaire d’un titre de séjour ayant bénéficié du regroupement familial doit prouver que la communauté de vie entre les époux n’a pas été rompue pour se voir délivrer ou renouveler son titre de séjour ainsi qu’il ressort des dispositions de L 313 11 4° du Code de l’entrée et du séjour des étrangers en France.

  • Mais qu’en est-il d’une personne étrangère qui a quitté son conjoint français ou de nationalité étrangère en situation régulière, en raison des violences qu’il exerçait sur elle ?

Dans ce cas, la délivrance ou le renouvellement du titre de séjour n’est pas conditionné au maintien de la vie commune ainsi qu’il ressort des dispositions des article L 423-5 et L 423-17 et L 423-18 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers.

Il appartient donc à l’autorité administrative, saisie d’une telle demande, d’apprécier, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, l’existence de violences conjugales ayant conduit à la rupture de la vie commune du demandeur avec son conjoint de nationalité française ou étranger en situation régulière.

  • Comment les préfectures apprécient-elles l’existence de violences conjugales ?

Nombreuses sont les administrations qui imposent l’existence d’une condamnation pénale à l’encontre du conjoint français ou étranger en situation régulière pour estimer que les violences conjugales sont caractérisées.

Cette exigence est défavorable pour les personnes victimes de violences conjugales étrangères et qui n’ont pas nécessairement obtenu la condamnation pénale de leur conjoint violent.

Le Conseil d’État vient récemment de censurer cette appréciation de l’administration.

A ce titre, dans une décision n° 454072 du 19 avril 2023 Le Conseil d’Etat affirme qu’une victime de violences conjugales de nationalité étrangère peut se voir délivrer ou renouveler un titre de séjour en dépit de l’absence de suites judiciaires contre l’auteur violent dès lors que d’autres éléments tels qu’un certificat médical ou des attestations de voisins peuvent corroborer les violences conjugales alléguées ayant conduit à la rupture de la communauté de vie.

Les juges de Cassation n’ont pas hésité à censurer les juges du fond Bordelais qui avaient considéré que le classement sans suite de la plainte pour violences physiques et psychologiques de la victime justifiait le non renouvellement de son titre de séjour assorti d’une obligation de quitter le territoire.

Il s’agit selon nous d’une décision juste censurant une appréciation administrative restrictive pour les victimes de violences conjugales étrangères.

Cet arrêt favorise une meilleure protection de ces dernières.

Les victimes de violences conjugales étrangères qui en plus de subir les méfaits d’un conjoint violent, craignent en plus de se retrouver « sans papier » et sous le coup d’une obligation de quitter le territoire dès lors qu’elles n’ont pas obtenu une condamnation de leur conjoint violent.

Le Conseil d’Etat dans la décision précitée apporte des précisions, il indique que l’administration préfectorale ne doit pas se contenter du classement sans suite d’une plainte pour violences conjugales pour rejeter la demande de renouvellement du titre de séjour des victimes de violences conjugales étrangères mais faire un examen approfondi en vérifiant s’il existe d’autres éléments prouvant lesdites violences conjugales.

Ce qui justifierait le cas échéant la délivrance et le renouvellement du titre de séjour des victimes de violences conjugales étrangères.